Sri Aurobindo

L’Angleterre… l’éloignement

Sri Aurobindo - Enfance et JeunesseSri Aurobindo est né à Calcutta le 15 août 1872.
L’Inde était gouvernée par les Anglais. Son père était médecin. Il pensait que son fils pouvait devenir un parfait gentleman anglais et obtenir les plus hauts postes.
À l’âge de trois ans, il l’envoya donc dans les écoles anglaises de Darjeeling, puis à sept ans à Londres, avec ses deux frères aînés, jusqu’à ses vingt et un ans. Sri Aurobindo n’eu alors plus aucun contact ni avec les gens de l’Inde, ni avec la culture indienne. À cette époque, il valait mieux avoir la peau blanche, car toutes les lois étaient faites par les blancs, et tous les postes importants étaient occupés par les blancs. Les Indiens étaient davantage vus comme des esclaves.

Extrait du volume 26, SABCL, « On Himself »

Je vois que vous avez persisté à donner une biographie — est-ce vraiment nécessaire ou utile ? Cette tentative est vouée à l’échec, parce que ni vous ni personne ne sait rien de toute ma vie; elle n’a pas été à la surface pour que les hommes la voient.
p.378

Élevé d’abord dans une famille anglaise de Manchester, il fréquente l’école St Paul de 1884 à 1890, puis le King’s College à Cambridge pendant 2 ans.
En 1890, il réussit le concours de la fonction publique indienne avant d’être disqualifié faute de s’être présenté à l’examen de circonscription. Réalisant ce que les Anglais font en Inde, il décide de ne plus travailler : réussir les études ne l’intéresse plus.
Il obtient néanmoins un poste dans l’administration à Baroda, une ville de l’État du Gujarat en Inde, chef-lieu administratif du district et capitale de l’ancien État princier. Il retrouve donc l’Inde en 1893, à l’âge de 21 ans.

Le retour en Inde

Il passe treize années dans cette administration, dans le département du Revenu, puis au service secrétariat du Maharadjah, ensuite comme professeur d’anglais et enfin comme vice-principal du Collège. Ce sont des années d’auto-apprentissages car il ne connait rien de l’hindouisme et de la culture de son pays d’origine.
Il n’a jamais lu aucun livre traditionnel.

Lorsqu’il découvre les Vedas et les Upanishads, il ressent tellement d’énergie et de puissance, qu’il est captivé et décide d’apprendre le sanskrit par lui-même afin de mieux comprendre ces textes sacrés.
Il apprend également le bengali de façon autodidacte, car il n’a jamais rien appris de sa langue natale pendant toutes ces années. Il connait très bien le français et l’anglais. Il a également étudié l’allemand et l’italien. C’est un véritable citoyen occidental jusqu’à ses vingt et un ans. Avant d’arriver en Inde, il a lu Dante et tous les grands auteurs occidentaux.

Retrouvant les langues de son pays d’origine, il peut découvrir toutes les philosophies orientales.

L’engagement politiqueSri Aurobindo

En 1906, peu après la partition du Bengale, Sri Aurobindo quitte son poste à Baroda et se rend à Calcutta, où il devient bientôt l’un des chefs du mouvement nationaliste. Il est le premier dirigeant politique en Inde à proposer ouvertement, dans son journal Bande Mataram, l’idée d’une indépendance totale pour le pays. Poursuivi deux fois pour sédition et une fois pour conspiration, il est libéré chaque fois pour manque de preuves.

Il développe un parti révolutionnaire et devient ainsi une des personnes les plus dangereuses aux yeux des Anglais. Et c’est à cause de son frère qu’il est mis en prison, car celui-ci a fait sauter une bombe pour tuer un magistrat anglais, le juge Kingsford. Ce dernier a fait emprisonner un grand nombre de journalistes et fait fouetter sauvagement un jeune partisan nationaliste. Il a attisé beaucoup de haine. Malheureusement, il n’est pas dans la voiture qu’ils font sauter. Deux Européennes sont tuées par erreur.
Pour les Anglais, Sri Aurobindo est LE responsable. Ils l’arrête et le mettent en prison pendant un an avec de nombreux jeunes partisans. Il écrit « Jours de prison » un livre simple et touchant, qui met en lumière la profonde grandeur spirituelle de l’Inde, face à la petitesse et l’arrogance de l’ego occidental dominant. Le contraste est saisissant ! les Anglais qui lisent ce livre ne doivent pas être très fiers de leurs ancêtres !

Le yoga intégral

Pendant cette période révolutionnaire, son frère se rend un jour à Calcutta pour le rencontrer dans l’ashram de leur plus jeune frère. Mais il tombe malade en arrivant. Il prend quelques médicaments pour se soigner, mais ils ne font aucun effet.
Alors, un yogi arrive. Il lui demande de prendre un verre d’eau.
Avec un couteau, il coupe l’eau, tout en récitant certains mantras, la mélange, puis il la lui donne à boire. Et il est guéri !
Sri Aurobindo se dit alors :
« Si cet homme peut guérir mon frère de sa maladie avec le pouvoir spirituel de ces mantras, pourquoi ne pourrais-je pas guérir l’Inde de ses maladies ? Avec le pouvoir de cette connaissance, il doit être possible de couper la tête de la domination anglaise. »
Ainsi, commence son extraordinaire aventure du yoga intégral.

Extrait du volume 26, SABCL, « On Himself »

Je n’avais aucune envie de spiritualité en moi – j’ai développé la spiritualité. J’étais incapable de comprendre la métaphysique – je suis devenu philosophe. Je n’avais pas d’oeil pour peindre – je l’ai développé par le Yoga. J’ai transformé ma nature de ce qu’elle était à ce qu’elle n’était pas. Je l’ai fait d’une manière spéciale, et non par miracle, et je l’ai fait pour montrer ce qui pouvait être fait et comment cela pouvait être fait. Je ne l’ai pas fait par nécessité personnelle ou par miracle sans aucun processus. Et si ce n’est pas le cas, alors mon Yoga a été inutile et ma vie était une erreur, un simple monstre absurde de la Nature sans sens ni conséquence.
p.148-9 (13-2-1935)

Sri Aurobindo commence sa pratique du Yoga en 1904. Il rassemble d’abord les éléments essentiels de l’expérience spirituelle qui sont acquis par les chemins de la communion divine et de la réalisation spirituelle suivis jusqu’à présent en Inde, puis il entre en quête d’une expérience plus complète, unissant et harmonisant les deux fins de l’existence : l’Esprit et la Matière.

Toute la vie de Sri Aurobindo exprime le pouvoir de la Mère Suprême qui s’incarne dans le corps.
Pendant douze ans, de 1926 à 1938, il vit retiré du monde. Seuls la Mère et Champaklal, son assistant personnel, l’approchent. Il vit un intense travail intérieur.

Sri Aurobindo écrivant

Avec la Mère, il est très actif en esprit tout au long de la seconde guerre mondiale. Il annonce dès le début que le nazisme va perdre la guerre et explique, à ses disciples, beaucoup de choses sur les jeux entre les forces, visibles et invisibles, qui se jouent au cours de ce conflit.
Contre toute attente, il soutient les forces alliées, dont fait partie l’Angleterre qui colonise l’Inde. Ses disciples ne comprenent pas ce soutien aux Anglais. Mais lui sait ce qui se trame dans l’invisible et son regard est plus vaste que la simple apparence des choses.

Sa spiritualité est ancrée dans le monde, auquel tout son travail intérieur est destiné, pour l’avènement d’une nouvelle humanité éclairée, harmonieuse et divine.

La plupart des voies du Yoga sont des voies vers l’Au-delà menant à l’Esprit et, à la fin, loin de la vie; Sri Aurobindo s’élève jusqu’à l’Esprit pour redecendre avec ses gains, apportant la lumière, la puissance et la félicité de l’Esprit, dans la vie pour la transformer. L’existence actuelle de l’homme dans le monde matériel est, dans cette vision, une vie dans l’Ignorance avec l’Inconscient à sa base, mais même dans ses ténèbres il y a la présence et les possibilités du Divin.

Le monde créé n’est pas une erreur ou une vanité et une illusion à rejeter par l’âme revenant au ciel ou au Nirvana, mais la scène d’une évolution spirituelle par laquelle, de cette inconscience matérielle, doit se manifester progressivement la Conscience Divine dans les choses.

Le mental est le terme le plus élevé encore atteint dans l’évolution, mais il n’est pas le plus élevé dont il est capable. Il y a au-dessus un Supramental ou une Conscience-de-Vérité éternelle qui est, dans sa nature, la lumière et la puissance de la Connaissance Divine Consciente, et qui se définit elle-même.

Le mental est une ignorance qui cherche la Vérité, mais c’est une Connaissance auto-existante qui manifeste harmonieusement le jeu de ses formes et de ses forces. C’est seulement par la descente de ce surmental, que la perfection rêvée par tout ce qui est le plus élevé en humanité, peut venir. Il est possible, en s’ouvrant à une plus grande conscience divine, de s’élever à ce pouvoir de lumière et de félicité, de découvrir son vrai moi, de rester en union constante avec le Divin et de faire tomber la Force supramentale pour la transformation de l’esprit, de la vie et du corps. Réaliser cette possibilité a été le but dynamique du Yoga de Sri Aurobindo.

Lorsqu’il quitte son enveloppe corporelle, le 5 décembre 1950, le Divin est tellement ancré dans toutes ses cellules et ses atomes, que tout son corps refléte une teinte dorée et rayonne d’une lumière dorée pourpre.
Cette lumière dure cinq jours, s’éteignant petit à petit.
Au terme de ces cinq jours, une fois que toute la lumière dorée s’estenvolée, il est placé dans le Samadhi qui a été préparé.

Sri AurobindoÀ propos de Grandeur

Extrait du volume 26, SABCL, « On Himself »

Vous semblez tous penser que c’est un grand compliment pour moi de dire que, ce que j’ai fait, n’a de sens pour personne sauf pour moi-même – c’est la critique la plus dommageable sur mon travail qui puisse être faite. Je ne l’ai pas fait par moi-même, si vous voulez dire : par moi-même l’Aurobindo qui était. IL l’a fait avec l’aide de Krishna et de la Shakti Divine. J’ai aussi eu l’aide de sources humaines.
p.148-9 (13-2-1935)

Mais quelles idées étranges ! — que je sois né avec un tempérament supramental et que je ne connaisse rien des dures réalités ! Bon Dieu ! Toute ma vie a été une lutte avec des réalités dures, depuis les difficultés, la famine en Angleterre et les difficultés constantes et féroces jusqu’aux difficultés beaucoup plus grandes qui surgissent continuellement ici à Pondichéry, externe et interne.
Ma vie a été une bataille dès ses premières années et est toujours une bataille : le fait que je le paie maintenant d’une chambre à l’étage et par des moyens spirituels, ainsi que d’autres qui sont externes, ne fait aucune différence à son caractère. Mais, bien sûr, comme nous n’avons pas crié à propos de ces choses, il est naturel, je suppose, pour d’autres de penser que je vis dans un rêve auguste et glamour, mangeant des lotus où aucun fait difficile de la vie ou de la nature se présentent. Mais quelle illusion quand même !
p.153-4

Vous pensez alors que chez moi (je n’inclus pas la Mère) il n’y a jamais eu de doute ou de désespoir, pas d’attaques de ce genre ? J’ai supporté toutes les attaques que des êtres humains ont supportées, sinon je serais incapable d’assurer à personne « Cela aussi peut être vaincu. » Au moins, je n’aurais pas le droit de le dire. Votre psychologie est terriblement rigide.
Je le répète, le Divin, lorsqu’il assume le fardeau de la nature terrestre, le prend pleinement, sincèrement et sans aucune ruse ni prétention. S’il a quelque chose derrière lui qui émerge toujours des couvertures, c’est la même chose en substance, même si elle est plus grande en degré, qu’il y a derrière les autres – et c’est pour réveiller qu’IL est ICI.

L’être psychique fait la même chose pour tous ceux qui sont destinés à la voie spirituelle – les hommes n’ont pas besoin d’être des êtres extraordinaires pour la suivre. C’est l’erreur que vous faites – de rabâcher la grandeur comme si seul le grand pouvait être spirituel.